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Newsletter n° 67 : Evaluation par Good Value for Money des réserves des fonds en euros à fin 2023

Achevé de rédiger le 06/12/2024

Newsletter n° 67

 

Réserves des fonds en euros à fin 2023
Provision pour Participation aux Bénéfices, Réserve de capitalisation, Plus-values latentes non-obligataires

 

L’analyse de l’évolution des réserves des fonds en euros des assureurs-vie à fin 2023 met en exergue la combinaison de plusieurs éléments relevant, pour les uns de décisions prises par bon nombre d’opérateurs, et pour les autres d’éléments subis à l’instar de l’évolution des taux d’intérêts et des marchés financiers.

En 2023, le secteur a consommé 9 milliards d’euros de Provision pour Participation aux Bénéfices (PPB) pour soutenir les taux servis. Il a également utilisé 4 milliards d’euros de réserve de capitalisation pour absorber la réalisation de moins-values obligataires inhérentes à la hausse des taux.

La chute du marché immobilier a fait perdre 14 milliards d’euros de plus-values latentes sur les investissements immobiliers. En parallèle, la bonne performance des marchés actions a permis d’augmenter les plus-values latentes sur ce poste de 7 milliards d’euros.

La baisse des réserves sur les fonds en euros peut ainsi être évaluée à 20 milliards d’euros fin 2023. Celles-ci sont passées de 176 milliards d’euros fin 2022 à 156 milliards d’euros fin 2023.

 

Cadre de la présente

Good Value for Money a le plaisir de vous envoyer présentement sa 67ème newsletter. Celle-ci a pour objet de vous informer de la situation financière des fonds en euros des assureurs-vie à fin 2023, en termes :

  • de provision pour participation aux bénéfices (PPB),
  • de réserve de capitalisation,
  • de plus-values latentes sur Immobilier,
  • de plus-values latentes sur Actions.

Vous pouvez accéder directement via l’espace documentaire de Good Value for Money aux données précises concernant votre assureur-vie. Pour cela, vous pouvez cliquer ici. Nous vous invitons ensuite à scroller vers le bas sur la rubrique « Situation de la provision pour participation aux bénéfices (PPB) et des autres réserves par assureur-vie ».

 

Nota bene :

  • Il peut arriver que les données indiquées dans la présente newsletter diffèrent de celles « officielles » concernant les assureurs cités. Par déontologie professionnelle, Good Value for Money applique les mêmes modes de calcul pour tous les acteurs, sans aucun retraitement derrière. Tout est ainsi tracé et produit de manière neutre et homogène.
  • Au regard du volume de données collectées par Good Value for Money, une erreur est toujours possible. Les données seront alors mises à jour sur le site.
  • Good Value for Money alimente de manière permanente ses données concernant les réserves des fonds en euros. Des enrichissements et des ajustements ont donc lieu (et auront lieu) au fil des prochaines semaines.
  • N’hésitez-pas à revenir régulièrement sur Good Value for Money pour bénéficier de nos mises à jour et de nos compléments.
  • Tous nos travaux sont réalisés dans un souci d’intégrité et d’information de l’épargnant. Nos publications sont intégralement tracées et s’appuient sur des données directement ou indirectement publiques.

 

Reprise des présents éléments

Les éléments figurant dans la présente newsletter peuvent être repris en totalité ou en partie, sous réserve d’en citer la source : « Site Good Value for Money spécialisé sur les assurances de personnes et les placements financiers ».

 

Le niveau moyen de réserve des fonds en euros poursuit son mouvement de baisse. Après avoir atteint un pic à 14,71 % fin 2021, il est passé respectivement à 11,65 % fin 2022 puis 11,40 % fin 2023.

 

La réserve de rendement de 11,40 % dans les fonds en euros fin 2023 s’établit comme suit :

  • 4,45 % au titre de la provision pour participation aux bénéfices (PPB)
    à comparer à 4,83 % fin 2022,
  • 1,36 % au titre de la réserve de capitalisation
    à comparer à 1,52 % fin 2022,
  • 1,60 % au titre des plus-values latentes immobilières
    à comparer à 2,43 % fin 2022, en soulignant que c’est le plus gros poste de baisse,
  • 4,07 % pour les plus-values latentes sur actions
    à comparer à 3,36 % fin 2022,
  • - 0,08 % au titre des autres plus-values latentes non-obligataires
    à comparer à - 0,49 % fin 2022.

Concrètement, une réserve de rendement de 11,4 % dans les actifs constitutifs du fonds en euros d’un assureur-vie signifie que celui-ci pourrait « soutenir » le taux servi aux épargnants de 1,40 % par an durant 8 années consécutives, au-delà du rendement financier courant du fonds net des frais de gestion et net de la rémunération de la marge de solvabilité.

Consulter ici le lien vers la photographie Good Value for Money de l’évolution des réserves globales des assureurs-vie dans les encours de leurs fonds en euros sur la période 2012-2023.

Consulter ici le lien vers la photographie Good Value for Money de la situation d’assureurs-vie du marché en termes de réserves globales dans leurs fonds en euros fin 2023.

 

Le secteur a consommé en moyenne 38 centimes de Provision pour Participation aux Bénéfices (PPB) en 2023 pour soutenir les taux servis. Celle-ci est ainsi passée de 4,83 % en moyenne fin 2022 à 4,45 % en moyenne fin 2023.

 

La bonne tenue des marchés financiers en 2023, avec notamment une hausse de + 16,5 % du CAC 40 a permis aux assureurs-vie de réaliser des plus-values sur actions au cours de l’été et de l’automne 2023. Ces plus-values ont contribué à doper les taux servis au titre de 2023 tout en minimisant la consommation de la provision pour participation aux bénéfices (PPB).

Soulignons également les mouvements importants réalisés par certains assureurs pour rehausser le rendement moyen de leur poche obligataire.

A titre d’exemple, Prédica (Groupe Crédit Agricole), qui est l’un des plus gros assureurs-vie de la place a acheté en 2023 16,6 Md€ d'obligations à taux fixes au taux moyen de 4,21 % et de maturité moyenne de 16 années. Pour ce faire, Prédica a notamment cédé 11,5 Md€ d'obligations en imputant la moins-value de 500 M€ sur sa réserve de capitalisation.

Totalement neutre pour les assureurs-vie en termes de résultat financier, l’imputation de moins-values obligataires sur la réserve de capitalisation permet de dégager des liquidités pour réinvestir à la hausse. Sous réserve de disposer de réserve de capitalisation bien évidemment.

5 bancassureurs concentrent toujours 60 % de la provision pour participation aux bénéfices du marché (PPB) fin 2023. Soulignons toutefois que ces 5 groupes ont restitué 5,3 Md€ de PPB pour soutenir leurs taux servis en 2023.

 

  • CNP (La Banque Postale) :
    • 13,05 Md€ de provision pour participation aux bénéfices (PPB) fin 2023
      versus 14,03 Md€ fin 2022,
    • soit un niveau de 6,07 % des encours en euros de la compagnie fin 2023
      versus 6,36 % fin 2022.

 

  • Prédica (Crédit Agricole / LCL) :
    • 9,08 Md€ de provision pour participation aux bénéfices (PPB) fin 2023
      versus 11,22 Md€ fin 2022,
    • soit un niveau de 4,46 % des encours en euros de la compagnie fin 2023
      versus 5,43 % fin 2022.

 

  • Cardif (BNP Paribas) :
    • 4,72 Md€ de provision pour participation aux bénéfices (PPB) fin 2023,
      versus 5,79 Md€ fin 2022,
    • soit un niveau de 5,02 % des encours en euros de la compagnie fin 2023
      versus 6,15 % fin 2022.

 

  • Sogécap (Société Générale, Crédit du Nord) :
    • 4,41 Md€ de provision pour participation aux bénéfices (PPB) fin 2023,
      versus 5,16 Md€ fin 2022,
    • soit un niveau de 6,75 % des encours en euros de la compagnie fin 2023
      versus 8,03 % fin 2022.

 

  • ACM (Crédit Mutuel Alliance Fédérale) :
    • 5,59 Md€ de provision pour participation aux bénéfices (PPB) fin 2022,
      versus 5,98 Md€ fin 2022,
    • soit un niveau de 6,24 % des encours en euros de la compagnie fin 2023
      versus 6,86 % fin 2022.

 

Consulter ici le lien vers la photographie Good Value for Money de la situation d’assureurs-vie du marché en termes de provision pour participation aux bénéfices (PPB) fin 2023.

 

Annexe 1. Eléments méthodologiques

 

Good Value for Money analyse chaque année les 4 postes de « richesse en réserve » d’un fonds en euros, susceptibles de venir « doper » ou « soutenir » la performance d’un fonds en euros (donc les taux servis) au-delà de la contribution des coupons sur obligations. Dans le contexte actuel de taux historiquement bas, ces réserves peuvent également jouer un rôle :

  • de capacité des assureurs-vie à absorber des chocs sur leurs investissements (grâce à la provision pour participation aux bénéfices) : plus un assureur-vie a de PPB et plus il est en capacité de diversifier ses placements (avec toutefois toutes les limites et contraintes liées aux normes prudentielles Solvabilité II),
  • de capacité des assureurs-vie à absorber, le cas échéant, une remontée rapide des taux d’intérêts (même si ce scénario apparaît actuellement peu probable) grâce à la réserve de capitalisation et aussi la provision pour participation aux bénéfices.

 

Même si certains assureurs-vie ont pu le contester historiquement, Good Value for Money intègre la réserve de capitalisation dans ses travaux. Celle-ci n’est pas directement distribuable aux épargnants, mais elle peut servir « d’amortisseur » en cas de choc sur une obligation.

Si une dette souveraine en Europe connaissait des soubresauts (par exemple : en cas de dérive budgétaire volontaire de la part de son Gouvernement), certains assureurs-vie pourraient décider de ponctionner une partie de leur réserve de capitalisation pour absorber des chocs.

 

Pour mémoire, Good Value for Money n’intègre jamais les plus-values latentes sur Obligations dans ses analyses et classements, car un assureur-vie garde normalement ses obligations jusqu’à leur échéance. Les plus-values latentes (ou moins-values) éventuelles sur obligations ne sont quasiment jamais réalisées par un assureur-vie. En outre, si certaines étaient d’aventure concrétisées, elles ne contribueraient pas au rendement de l’année ; elles alimenteraient positivement (ou négativement) la réserve de capitalisation.

 

Pour réaliser la présente newsletter, Good Value for Money a analysé de manière détaillée :

  • les comptes de 81 assureurs-vie, y compris Mutuelles et Institutions de Prévoyance,
  • pour un montant d’encours de 1 374 Md€ fin 2023, en sachant que ces mêmes assureurs-vie avaient par ailleurs 500 Md€ d’unités de compte en portefeuille détenues par leurs clients.

L’assiette benchmarkée par Good Value for Money est donc au global de 1 874 Md€.

 

Les encours d’assurance-vie benchmarkés par Good Value for Money sont plus importants que ceux communiqués par la France Assureurs, car Good Value for Money intègre également l’activité réalisée, le cas échéant, par des Institutions de Prévoyance et des Mutuelles Livre II.

 

Good Value for Money apporte des points de repère sur 12 années, à savoir toute la période 2012 à 2023.

 

Définition des notions techniques utilisées

Réserve de capitalisation

La réserve de capitalisation est une réserve :

  • alimentée par les assureurs-vie avec les plus-values réalisées lors de la cession d’obligations, en sachant que l’usage est habituellement de conserver les obligations jusqu’à leur échéance,
  • ponctionnée symétriquement pour compenser les moins-values obligataires qui se sont concrétisées, ce qui a par exemple été le cas historiquement lors de la restructuration de la dette souveraine grecque.

La réserve de capitalisation n’intègre pas les plus et moins-values latentes sur les obligations. Compte-tenu du fonctionnement de la réserve de capitalisation, les plus et moins-values obligataires éventuellement réalisées lors de la cession d’obligations n’affectent pas le rendement financier du fonds en euros et la participation aux bénéfices (alimentés en revanche par les coupons et intérêts dégagés sur ces mêmes obligations).

 

La réserve de capitalisation est l’un des « coussins » permettant aux assureurs-vie d’amortir d’éventuelles évolutions de taux d’intérêt et de stabiliser le rendement de la poche obligataire de leur fonds en euros.

Notons enfin que la réserve de capitalisation appartient aux assurés, c’est-à-dire aux détenteurs de contrats d’assurance-vie.

 

Participation aux bénéfices (PB)

Toute compagnie d’assurance-vie est tenue de reverser à ses assurés un minimum :

  • de 90 % de ses bénéfices techniques,
  • et de 85 % de ses bénéfices financiers,

en vertu de la règle imposée par le Code des assurances depuis la loi du 17 décembre 1966 sur la participation aux excédents.

Cette rémunération peut être reversée aux assurés :

  • soit sous forme de PB immédiate au titre de l’exercice qui vient de s’écouler,
  • soit via une alimentation de la provision pour participation aux bénéfices (PPB).

 

Les règles de participation aux bénéfices s’appréhendent globalement au niveau de chaque compagnie, ce qui explique qu’un même assureur-vie peut, en toute légalité, servir des taux de rendement différents à deux assurés investis sur un même fonds en euros. Les conditions générales d’un contrat d’assurance-vie précisent les modalités d’affectation de la PB.

 

Le taux minimum garanti (TAG) éventuel et la PB constituent le taux de rendement servi à l’assuré (avant déduction des frais et des prélèvements sociaux). Ils font partie des éléments que l’assureur a l’obligation de communiquer chaque année au souscripteur / adhérent (pour les contrats de plus de 2 000 euros d’encours).

 

Compte-tenu de la forte baisse des rendements obligataires, il est désormais fréquent que la participation aux bénéfices d’un fonds en euros ne permette pas de verser à tous les assurés le taux minimum garanti (TAG) contractuellement prévu pour certains d’entre eux. Dans ce cas, la compagnie verse le TAG contractuel à ses assurés qui en bénéficient en « ponctionnant » la PB des autres.

 

Provision pour participation aux bénéfices (PPB)

Les assureurs-vie ne sont pas obligés de distribuer immédiatement la participation aux bénéfices (PB) prévue par la législation.

La partie non distribuée de la PB vient alimenter la provision pour participation aux bénéfices (PPB). Très souple d’utilisation, la PPB est la véritable variable d’ajustement des taux de rendement, car elle permet de lisser dans le temps les taux de rémunération servis aux assurés au titre des contrats et fonds en euros. La PPB appartient aux assurés mais c’est un bien collectif (il n’est pas possible de réclamer sa quote-part de PPB lorsque l’on rachète son contrat).

 

A la différence de la réserve de capitalisation pour laquelle un assureur-vie peut décider de l’alimenter dans le temps sans en restituer tout ou partie à ses assurés, la participation aux bénéfices (PB) provisionnée à l’issue d’un exercice doit être restituée aux assurés dans un délai maximum de 8 années. Concrètement, cela signifie que la quote-part de participation aux bénéfices (PB) qui pourrait être mise en réserve par un assureur-vie à l’issue de l’exercice 2024 devrait obligatoirement être reversée aux épargnants d’ici au 31 décembre 2032 au plus tard. Mais les épargnants de demain qui en bénéficieront ne seront pas nécessairement les mêmes que ceux d’aujourd’hui.

 

Provision pour dépréciation durable (PDD)

Une provision pour dépréciation durable (PDD) est constituée si :

  • la valeur de marché d’un actif du fonds en euros est inférieure à sa valeur au bilan,
  • et si cette situation de moins-value latente est considérée comme durable.

La PDD est calculée ligne à ligne, c'est-à-dire pour chaque titre.

 

La règle est de constituer une PDD :

  • si un actif baisse de plus de 20 % (30 % en période de forte volatilité des marchés),
  • pendant au moins 6 mois.

Lorsque les titres en question regagnent de la valeur, l’assureur peut procéder à une reprise de PDD.

 

Provision pour risque d’exigibilité (PRE)

La PRE est constituée si, après calcul de la PDD, la valeur de réalisation de l’ensemble des actifs non obligataires du portefeuille d’actifs de l’assureur (actions, immobilier, OPCVM…) est globalement inférieure à la valeur inscrite au bilan, ce qui correspond à une situation de moins-value nette globale.

C’est une façon pour l’assureur de provisionner un éventuel risque de liquidité qu’occasionnerait la vente d’actifs à perte.

La PRE peut être passée à 100 % à la fin de l’exercice, ou lissée sur 3 à 8 ans, sur décision de l’ACPR. Elle peut être reprise l’année suivante si les conditions le justifient.

 

Rédigé par Cyrille Chartier-Kastler

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